ENQUÊTE #2
Restaurateurs solidaires et responsables : coup de cœur ou coup de com' ?
Être restaurateur responsable, c’est offrir une cuisine plus propre dans un monde plus beau. Solidaire, durable, engagé … Oui mais, comment et pourquoi ?
ENQUÊTE #2
Être restaurateur responsable, c’est offrir une cuisine plus propre dans un monde plus beau. Solidaire, durable, engagé … Oui mais, comment et pourquoi ?
ENQUÊTE #2
La sauvegarde de la planète et la solidarité, deux prérogatives actuelles. Les restaurateurs, comme tous les citoyens, se sentent concernés. Offrir une cuisine plus propre dans un monde plus beau, quel beau slogan pour votre restaurant.
Oui mais comment s’assurer que ce n’est pas un effet de mode ? Un argument marketing ? En d’autres termes : bullshit ou conviction profonde ?
D’après Guillaume Erblang-Rotaru – Rédacteur en chef du Webzine Food&Sens – : “Le durable et le social ne sont plus des tendances mais un véritable phénomène de société fédéré par des valeurs fortes et quelques fois également l’appartenance à une communauté. Les initiatives fleurissent un peu partout dans la restauration car les chefs ont aujourd’hui le pouvoir de s’approprier et de propager des idées fédératrices à un large public. Leur pouvoir est souvent plus fort que celui d’un industriel car il est au plus proche des consommateurs ce qui lui donne une grande responsabilité”.
Au menu de cette enquête :
Un restaurateur solidaire, poursuit Guillaume Erblang-Rotaru “est un restaurateur attentif, sensible et engagé envers son prochain. Il peut, à son échelle, devenir acteur et aider ses producteurs mais également une population victime de discriminations ou poussée à rester à la marge. Mais ces deux axes sont différents, bien que solidaires, ils peuvent prendre la forme d’une aide financière ou en nature. Le cas du Refettorio est intéressant car certains donnent leurs produits et d’autres donnent de leur temps pour aider les plus pauvres.
Mais être un restaurateur solidaire peut aussi prendre d’autres formes. Être en phase avec les valeurs personnelles de ceux qui les entreprennent. Le chef Régis Marcon est l’exemple d’un chef engagé au rayonnement fort mais qui reste tout de même discret. Il est engagé pour la valorisation de la filière.”
La définition d’un restaurateur responsable tient en ces mots : “un restaurateur responsable et durable, se doit idéalement de consommer des produits de saison, locaux, de petits producteurs et doit également porter une attention particulière à l’ensemble des produits nécessaires à l’exploitation de son établissement, à la gestion de ses déchets,… “
Et puis, il y a le restaurateur responsable et solidaire qui agit sur les deux fronts.
Geste gratuit ou stratégie marketing ? Y a-t-il toujours cohérence dans les actes ? À voir. Que penser de la “responsabilité” d’un restaurateur qui cultive ses légumes mais roule en Bugatti ? Guillaume Erblang-Rotaru nous conseille de regarder les actes derrière les discours.
De par son métier, le restaurateur est au cœur de la thématique du bien manger.
Du point de vue de la loi, un restaurateur responsable peut se sentir bien seul. Très peu de textes obligent les chefs à fournir des efforts en faveur de l’environnement. Gestion des déchets selon un certain tonnage, interdiction d’utiliser du plastique jetable ou obligation d’avoir une solution de doggy bag …
Pour autant, comme pour de nombreuses situations sociétales, les restaurateurs n’attendent pas le poids de la loi pour agir. S’ils se regroupent autour de la thématique de l’urgence écologique, c’est parce que la demande est là. Les clients ne vont pas au restaurant pour manger moins bien que chez eux. 70% des Français sont même prêts à payer plus pour manger mieux.
Aussi, rappelons que la responsabilité n’est pas qu’une question d’écologie. C’est une question d’éco-système, de société, de responsabilité sur des forces vives. Ces différentes nuances, vous pourrez les retrouver dans nos différentes interviews Guestonlive qui traitent de ces trois sujets : la responsabilité, le futur et le digital dans la restauration.
Poussés par une société qui attend beaucoup de leurs actions, les restaurateurs qui veulent survivre iraient dans le sens d’une recherche de qualité des ingrédients utilisés. Et c’est vrai pour toutes les strates de la restauration, que l’on soit étoilé ou bistrot du coin. La tendance du fast good ou du fast casual vient appuyer cette réflexion : on ne peut plus être dans le statu quo.
Hélène Binet, éditrice de Un œil en salle, le média des actualités et des tendances des métiers de la salle, sillonne la France pour mettre en avant les métiers de la salle des restaurants. Sur les restaurateurs responsables, elle nous fournit ce point de vue :
Hélène nous parle du concours « Saveurs durables » dont le slogan annonce la couleur : “pour une cuisine gourmande, éthique et écologique”. Les candidats, des étudiants en dernière année de Bac Pro, sont rompus à l’exercice de la responsabilité. Ils se voient attribuer des points sur base de l’attention portée à l’empreinte carbone de leurs recettes.
Demain, ces étudiants éco-responsables ouvriront leurs restaurants. On parle toujours d’effet de mode ? De menace pour les restaurants qui ne suivront pas ? Ou peut-on oser le terme de réinvention de la restauration, à l’instar de ce qu’il s’est passé suite à la pandémie, et la digitalisation en marche forcée des restaurateurs ?
C’est l’histoire de la poule et l’œuf : un restaurateur devient-il responsable pour que l’on parle de lui ou est-ce que l’on parle de lui parce qu’il est responsable ? Est-il finalement cynique, réaliste ou avant-gardiste ?
Dans tous les cas, se présenter comme restaurateur responsable représente indéniablement un élément de différenciation.
Cultiver soi-même ses produits, certains chefs l’ont compris, apporte plus de valeur ajoutée. L’engagement responsable, certes d’abord passionnel, ça attire les médias. Inspirants et médiatisés, Olivier Roellinger et Alain Passard en sont deux exemples.
Enfin, cuisiner en conscience, ça rapporte de la reconnaissance. Comme celle reçue par le Bar Résine à Bordeaux. Les propriétaires cultivent leurs propres fruits pour leurs cocktails, ce qui leur a valu en 2019 le prix coup de cœur des organisateurs du salon Cocktails Spirits.
En parlant de différenciation, de visibilité et de reconnaissance, qui de mieux qu’un Bocuse ou qu’un Michelin pour marquer la transition vers cette nouvelle normalité ? En secouant les cocotiers avec une étoile verte (!) ou un award pour l’équipe engagée, ces figures incontestées du monde culinaire apportent leur pierre à un édifice qui s’ancre progressivement dans les consciences.
Nous avons à reprendre la main sur nos cultures, et cesser de laisser notre alimentation manipulée par les multinationales !
On peut se demander si un retour à la terre ne serait pas faire machine arrière. Loin de là, la technologie se met au service des nouvelles pratiques du durable : dans la culture, la conservation, le traitement des produits et le service. C’est une question d’adaptation, de bonne volonté et de torsion des modèles actuels.
Et la Food Tech, se préoccupe-t-elle du durable ? Oui, c’est même le cheval de bataille d’applications dont l’objectif est la recherche de produits sains ou l’adoption de nouveaux comportements.
Maddyness nous parle même de retour à la terre dans le Food Tech. Des exemples ? L’application du Bon produit au bon endroit géolocalise les commerces et restaurants privilégiant les circuits courts. Et contre le gaspillage alimentaire, TooGoodToGo, voit son succès dépasser les frontières de la France.
Et le solidaire dans tout ça ? Que font les restaurateurs ?
L’histoire de la solidarité dans le chef des restaurants a plus de 100 ans. Les premiers dîners caritatifs, c’est Auguste Escoffier, en 1912, qui les a lancés. Ces « Dîners d’Epicure » visaient la récolte de fonds pour la caisse de retraite de chefs cuisiniers.
Depuis lors, de nombreux restaurateurs offrent des repas de charité, des concerts et beaucoup plus. L‘humanisme est dans leurs tripes. Un très bon exemple ? Le restaurant « Le République », à Marseille, véritable restaurant d’insertion, qui utilise une double tarification :
« C’est avec la volonté de réunir tout Marseille dans notre établissement que nous accueillons une clientèle traditionnelle payant ses repas au tarif classique et des bénéficiaires auxquels nous proposons petits déjeuners, déjeuners et dîners pour 1€ symbolique. »
Cet acte de restauration solidaire est porté par l’association La Petite Lili et reçoit l’appui de nombreux acteurs de la gastronomie de la région et utilisateurs de Guestonline, comme Glenn Viel, Alexandre Mazzia ou Gérald Passedat …
Savoir à qui donner et surtout où va l’argent restent des préoccupations des chefs qui veulent soutenir une cause. Ils soutiennent plus facilement les associations du quartier ou du village qu’ils connaissent. Et puis, un jour, une cause plus grande les touche. Ils s’y engagent ou lancent une initiative.
Agir dans sa ville, à Vannes, c’est ce que souhaitait Julien Le Berre, fondateur de la Labonapp, premier site de réservation solidaire reconnu d’utilité sociale. Et gratuite. Julien Le Berre rêvait d’une solidarité locale et un retour sur investissement pour les restaurants investis dans son projet. Et ça marche : Labonapp reverse 50 % de ses profits en tickets repas aux centres d’action sociale de la ville. Des tickets repas échangeables dans les restaurants locaux. La boucle est bouclée. A Vannes et dans plusieurs autres villes depuis.
Il y a des projets, des espoirs et des valeurs qui font fi des frontières locales et nationales. Avec la Réservation Responsable, Guestonline propose de soutenir des associations qui œuvrent pour l’éducation alimentaire. Qu’elles soient actives au Népal, en Île de France ou ailleurs, ce n’est plus tellement une localité que l’on défend, mais une certaine idée du futur.
Loin de l’utopisme et des phrases toutes faites, ces associations ont un but universaliste en enclenchant des actions concrètes et transparentes avec les jeunes du monde. C’est d’ailleurs cette transparence au niveau des fonds investis qui a plu aux chefs ambassadeurs de l’aventure. Comme le chef Bernard Marillier, du Gourmet de Sèze (Lyon).
J’avais envie d’aider à plus grande échelle. Mais il est difficile de sortir de l’argent sans savoir où il va. Ici, c’est clair et précis. Alors on joue le jeu. Chacun peut s’informer des résultats concrets de cette opération pour les enfants grâce à un rapport qui est réalisé chaque année.
Dans le chef du restaurateur, un dilemme : mettre sa réputation au service d’une cause ou étaler son côté social pour faire avancer sa réputation ? Encore une fois, le bien fondé d’une prise de parole pourrait passer pour du cynisme, de la manipulation ou du bullshit.
Et en ces temps où tout est sujet à discussion, il est compréhensible qu’un chef tourne sept fois sa langue dans sa bouche avant d’affirmer qu’il est un restaurateur responsable.
Une figure comme Philippe Etchebest, chef au Quatrième mur (Bordeaux), animateur et juré pour Top Chef, résout une partie de l’équation :
« J’utilise mon nom et ma réputation pour faire avancer les choses ».
La solidarité médiatisée, un outil marketing servant l’image ? Nos interviewés s’accordent pour dire qu’il y a une stratégie de personal branding lorsqu’un restaurateur participe à une grande cause et l’étale notamment via communiqués de presse. Un acte de marketing en faveur de sa notoriété. Au minimum.
Les restaurateurs cuisinent-ils plus vert et plus social pour attirer la lumière sur eux ?
La différence entre un vrai engagement et une recherche de médiatisation à tout prix réside dans l’ampleur de l’action.
Une participation à un évènement caritatif ponctuel et éphémère avec beaucoup d’effet d’annonce et relativement peu d’investissement, c’est du marketing. Un besoin de dorer son image. Ethiquement, c’est assez limite.
En parler, est-ce toujours pour faire parler de soi ? La nuance est apportée par Guillaume Erblang, responsable réseau Les Collectionneurs.
Notre enquête nous a permis de découvrir que la solidarité n’est pas le privilège des chefs étoilés.
Dans le monde de la restauration, il n’y a pas que les chefs qui se mobilisent. Le personnel de salle participe aussi en nombre aux initiatives solidaires. Citons Denis Courtiade, meilleur directeur de salle du monde, parrain de Croq’L’espoir.
Et puis, les chefs en devenir se mettent aussi à la solidarité dès leurs études. Un exemple ? « La Semaine des Ecoles Hôtelières » durant laquelle les élèves cuisinent des repas pour les bénéficiaires de l’aide alimentaire.
Et pourquoi pas les deux ? D’ailleurs Labonapp ne veut travailler dorénavant qu’avec des restaurateurs responsables pour son projet solidaire. Des responsables… solidaires.
De leur côté, les écoles hôtelières travaillent depuis plusieurs années sur cette double bataille du durable et du solidaire. La dimension éco-responsable est d’ailleurs inscrite dans le programme de l’éducation nationale. Quant à la solidarité, elle prend la forme de repas pédagogiques ou de service bénévole pour des œuvres caritatives.
En parler, est-ce toujours pour faire parler de soi ? La nuance est apportée par Guillaume Erblang, responsable réseau Les Collectionneurs.
Cuisiner, un art qui fait appel aux 5 sens. Auquel s’ajoute un 6ème : donner du sens.
L’ADN du métier ? Guillaume Erblang-Rotaru nous raconte « À la fin de mes études de cuisine en me remettant le prix d’apprenti méritant, la directrice de la CCI dans la région où j’ai fait mes études m’a dit : «Vous avez beaucoup de chance ! Vous faites le plus beau métier du monde car vous donnez du bonheur aux gens ! »
Elle avait raison : ce bonheur, les professionnels de la restauration, qu’ils soient en cuisine ou en salle, le partagent avec leurs clients tous les jours. Aujourd’hui, ils sont nombreux à sortir de leur restaurant pour partager avec beaucoup de générosité ce bonheur bien au-delà de leurs murs. Pour moi, la générosité et le partage sont les valeurs fondatrices de notre profession.»
Nos restaurateurs interrogés agissent aussi dans l’ombre. Comme l’un d’eux qui a financé la réparation du bateau de pêche de son fournisseur de poissons, de manière anonyme et désintéressée de toute gloire. Un exemple qui montre qu’un restaurateur ne cherche pas à tout prix à faire un don pour bénéficier d’un régime fiscal favorable.
Comme vous et moi, les restaurateurs font aussi du bien sans le crier sur tous les toits. N’est-ce pas là la vraie noblesse du don ?
La Tour, grâce à ses clients s’engage dans la Réservation Responsable pour que tous nos petits efforts servent de grandes causes.
En 2017, Guestonline lançait la version « responsable » de son module de réservation. En 2021, Guestonline généralisait la Responsabilité de son module pour tous les nouveaux bénéficiaires. Dans cette volonté d’un nouveau normal, c’est un acte fort qui est pris par la société Toulousaine : toutes les réservations sont responsables, parce que c’est comme ça que le monde doit avancer.
En reversant 0,10€ par couvert réservé à une des associations qui œuvrent dans l’éducation alimentaire, le restaurateur fait un premier pas pour devenir un restaurateur responsable. Et il peut l’utiliser en bannière, comme argument marketing, ou ne pas en faire trop écho, considérant que c’est « comme ça, et pas autrement ».
Sur une autre échelle, la Réservation Responsable fait aussi bouger les lignes. En s’alliant avec la Réservation Responsable comme module de réservation de ses restaurants partenaires, SIRHA Food prônait un message clair lors de ses deux salons, SIRHA Lyon et Omnivore.
Un message qui dit que tous les acteurs de la filière, qu’ils soient directement en salle ou sur les fourneaux, ou dans la proche périphérie, doivent s’engager. Que ne pas s’engager, ne pas être responsable ni solidaire, c’est faire un pied de nez au futur. Et qu’attendre que tout aille bien ne sera jamais une solution.
Fin 2021, plus de 100 maisons utilisaient la Réservation Responsable. Et vous, qu’attendez-vous pour vous lancer dans les pas des centaines de restaurateurs responsables ?
Une sélection de nos meilleurs articles pour votre restaurant une fois par mois dans votre boîte mail.
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